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LA NATURE DE L'ETRE HUMAIN

par

Rudolf Steiner

Lors de l'étude de l'être humain du point de vue d'un mode de connaissance suprasensible, on est immédiatement en prise avec le caractère général de cette démarche. Elle repose sur la reconnaissance du " mystère manifesté " au sein de la nature humaine de tout individu. Aux sens ainsi qu’à l'intelligence qui s'appuie sur ceux-ci n'est accessible qu’une partie de ce que la connaissance suprasensible est capable de saisir de l'être humain, c'est-à-dire le corps physique. Pour éclairer le concept de ce corps physique, il faut d'abord porter son attention sur un phénomène qui, tel une grande énigme, domine toute observation de la vie: la mort, et en rapport avec elle, la nature dite inanimée, le règne minéral qui est toujours synonyme de mort. Il est fait allusion ici à des faits que seule la connaissance suprasensible peut vraiment expliquer. Une grande partie de cet ouvrage doit leur être consacrée. Pour permettre de s'orienter, nous désirons d'abord suggérer ici quelques représentations.

Au sein du monde manifesté, son corps physique est ce que l'homme a de plus semblable au règne minéral. Par contre, ce qui distingue l'être humain du règne minéral ne peut pas être considéré comme étant le corps physique. Ce qui importe avant tout pour une observation sans prévention, c'est le fait que la mort, une fois qu'elle est intervenue, met à nu ce qui, chez l'homme, est de même nature que le monde minéral. On peut dire que le cadavre est ce qui est soumis chez l'homme, lorsqu'il est mort, à des processus qui se retrouvent dans le monde minéral. On peut souligner le fait que, dans cet élément de la nature humaine qu'est le cadavre, agissent les mêmes forces et les mêmes substances que dans le règne minéral, mais il faut préciser avec non moins d’insistance qu’à la mort commence la décomposition de ce corps physique. Il est également permis de dire qu'il y a dans le corps physique les mêmes substances et les mêmes forces que dans le règne minéral, mais que pendant la vie leur activité est mise au service d’un but supérieur. Leur action n'est semblable à celle du règne minéral que lorsque la mort est survenue. Elles se comportent alors conformément à leur nature, c' est-à-dire qu’elles détruisent la forme du corps physique.

Il faut donc faire une distinction très nette chez l'homme entre ce qui est manifesté et ce qui est caché. Car pendant la vie, l'élément caché doit mener un combat incessant dans le corps physique contre les forces et les substances du règne minéral. Si ce combat cesse, l'activité minérale entre en jeu. Et c’est ici que doit intervenir la science du suprasensible. Elle doit rechercher ce qui mène ce combat et qui demeure caché à la perception des sens. Cet élément n'est accessible qu'à l'observation suprasensible. On verra dans une partie ultérieure de cet ouvrage comment l'homme réussit à ce que cet élément " caché " devienne aussi visible que le sont les phénomènes sensibles pour la vision ordinaire. Mais nous allons d'abord décrire ce qui se révèle à la perception suprasensible.

Nous avons déjà dit que les communications au sujet de la voie qui permet d'accéder à la vue supérieure n'ont de valeur pour l'homme que s'il est tout d'abord familiarisé avec le simple récit de ce que dévoile l'investigation suprasensible. Car dans ce domaine, on peut parfaitement comprendre ce qu'on n'observe pas encore. Le meilleur chemin menant à la vision, c'est bien celui qui part de la compréhension.

Si l'élément caché, qui dans le corps physique lutte contre la décomposition, ne peut être observé grâce à la vue supérieure, il se révèle pourtant clairement par ses effets à la faculté de jugement limitée au monde manifesté. Et ces effets se manifestent dans la forme, dans la structure selon laquelle les forces et les substances minérales du corps physique sont unies pendant la vie. Cette forme disparaît peu à peu et le corps physique devient une partie de l'ensemble du monde minéral quand la mort est survenue. Or la vue suprasensible permet d'observer, tel un élément distinct de l'entité humaine, ce qui empêche les substances et les forces physiques de suivre, pendant la vie, leurs propres voies qui aboutissent à la dissolution du corps physique. Cet élément indépendant, nous l'appellerons " corps éthérique " ou " corps de vie ". Pour éviter que, dès le début surgissent des malentendus, il faut, au sujet de ces appellations appliquées à un second composant de l'entité humaine, tenir compte de deux aspects. Le mot " éther " est employé ici dans un tout autre sens que dans la physique qui donne ce nom, par exemple, au support de la lumière. Ici l'emploi de ce terme est limité au sens qui vient d'être indiqué. Il s'applique à ce qui est accessible à la vue supérieure et dont seuls les effets sont accessibles à notre perception sensorielle, c'est-à-dire à ce qui donne une forme précise à l'ensemble des substances minérales et des forces présentes dans le corps physique. Il ne faut pas non plus se méprendre sur le sens du mot " corps ". Pour désigner les réalités supérieures de l'existence, on est bien forcé d'employer les termes de la langue usuelle. Pour l'observation sensorielle ceux-ci n'expriment que ce qui appartient au domaine du sensible. Bien entendu, sous l'aspect sensoriel, le " corps éthérique " n’a rien d’un " corps ", si subtil qu’on puisse l’imaginer.

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Ce corps éthérique est donc un second élément de la nature humaine. Pour la connaissance suprasensible, il est à un degré de réalité nettement supérieur à celui du corps physique. Le corps éthérique imprègne de toutes parts le corps physique et qu'il faut le considérer comme une sorte d'architecte de celui-ci. Tous les organes sont maintenus dans leur forme et dans leur structure par les courants et les mouvements du corps éthérique. Au coeur physique correspond un "coeur éthérique ", au cerveau physique un " cerveau éthérique " etc. Le corps éthérique est structuré comme le corps physique, bien que d'une façon plus compliquée, et tout y est vivant, en mouvement, en perpétuelle circulation, alors que le corps physique est composé de parties distinctement séparées.

De même que le corps physique est commun à l’homme et au minéral, le corps éthérique est commun à l'homme et au végétal. Tout ce qui vit a son corps éthérique.

Du corps éthérique, l'observation suprasensible passe à un nouvel élément de l'entité humaine. Pour s'en faire une représentation, il faut se reporter au phénomène qu'est le sommeil, comme il a fallu pour le corps éthérique se reporter au phénomène de la mort. Dans la mesure où il s'agit du domaine manifesté, tout ce qu'accomplit l'être humain repose sur son activité à l'état de veille. Or cette activité n'est possible que si l'homme tire sans cesse de son sommeil de quoi reconstituer ses forces épuisées. Dans le sommeil, action et pensée disparaissent; toute joie, toute douleur sombrent dans l'inconscient. C'est comme jaillies de sources cachées et mystérieuses, que les forces conscientes de l'homme, au moment du réveil, se dégagent de l'inconscient du sommeil. C'est la même conscience qui disparaît dans d’obscures profondeurs quand on s'endort et qui en surgit de nouveau au réveil. Ce qui fait que l'être resurgisse sans cesse de l'inconscient est dû, selon la connaissance suprasensible, à un troisième élément de la nature humaine. On peut l'appeler le corps astral. De même que le corps physique conserve sa forme, non du fait des substances et des forces minérales qu’il contient, mais grâce au corps éthérique qui l'imprègne, de même les forces de ce corps éthérique ne peuvent pas, par elles-mêmes, se pénétrer de la lumière de la conscience. Un corps éthérique livré à lui-même serait en permanence dans un état de sommeil. On peut également dire: il ne pourrait entretenir dans le corps physique qu'une vie végétative. Tout corps éthérique éveillé est illuminé par un corps astral. Pour l'observation sensorielle, l'effet du corps astral disparaît dès que l'homme s'endort. Pour l'observation suprasensible il est toujours présent, quoiqu'il apparaisse comme séparé et en quelque sorte soulevé hors du corps éthérique. L'observation sensorielle n’a pas affaire au corps astral lui-même mais seulement à ses effets manifestés. Pendant le sommeil ceux-ci ne sont pas directement présents. Tout comme le corps physique est commun à l'homme et aux, minéraux, le corps éthérique à l'homme et aux végétaux, de même le corps astral de l'homme l'apparente aux animaux. Les plantes sont dans un état de sommeil perpétuel. Quiconque manque de précision dans ses jugements succombe facilement à l'erreur d'attribuer également aux plantes une sorte de conscience analogue à celle que possèdent, à l'état de veille, les animaux et les hommes. Cette erreur n'est possible que si l'on se fait une représentation imprécise de la conscience. Lorsqu'une plante est l'objet d’une excitation extérieure, on dit qu’elle fait certains mouvements comparables à ceux d'un animal. On parle de la sensibilité de certaines plantes qui par exemple, sous une influence extérieure, contractent leurs feuilles. Or ce qui caractérise la conscience, ce n'est pas le fait qu'un être, face à une incitation, puisse manifester une réaction, mais le fait que cet être passe par une expérience intérieure qui s'ajoute comme un phénomène nouveau à la simple réaction. Sans quoi on pourrait aussi parler de conscience lorsqu’un morceau de fer se dilate sous l'effet de la chaleur. Il n'y a conscience que lorsque l'être éprouve une sensation de douleur causée, par exemple, par la chaleur.

Quant au quatrième élément que la connaissance suprasensible attribue à l'entité humaine, l'être humain ne l'a pas en commun avec le monde manifeste qui l'entoure. C'est un élément qui le distingue des autres êtres et qui fait de lui le couronnement de la création à laquelle il appartient. La connaissance suprasensible se fait une représentation de ce quatrième élément de l'entité humaine en signalant que parmi les expériences faites à l'état de veille il existe entre elles des différences fondamentales. Ces différences apparaissent dès que l'attention se porte sur le fait qu'à l'état de veille l'homme est sans cesse au centre d'expériences qui vont et viennent nécessairement, et que d'autre part il fait aussi des expériences où cela n'est pas le cas. Cela apparaît tout particulièrement lorsqu'on compare les expériences de l'homme à celles de l'animal. Ce dernier ressent une grande régularité des influences du monde extérieur; sous l'action de la souffrance ou de la jouissance, de certains phénomènes qui se produisent régulièrement dans son corps, il prend conscience de la faim et de la soif. La vie de l'homme ne se borne pas à des expériences de ce genre. Il peut développer des passions, des désirs qui vont bien au-delà. Si l'on cherchait assez loin, on pourrait toujours donner la preuve chez l’animal, que ce soit dans son corps ou hors de celui-ci, de l'endroit où réside la cause déterminante d’une action ou d’une sensation. Ce n’est nullement le cas chez l'homme. Il peut engendrer des aspirations et des désirs dont la cause ne s'explique pas entièrement par ce qui se déroule à l'intérieur ou à l'extérieur de son corps. Tout ce qui rentre dans ce domaine doit être attribué à une source particulière. Et cette source, la science du suprasensible la voit dans le " Moi " ou le " Je " de l’être humain. On peut donc considérer le " Moi " comme le quatrième élément de l'entité humaine. Si le corps astral était abandonné à lui-même, les sentiments de plaisir et de douleur, les sensations de faim et de soif se dérouleraient en son sein, mais ce qui ne se produirait pas, c'est l'impression qu' il y a dans tout cela quelque chose de durable. Ce n'est pas cet élément permanent en tant que tel, que nous appelons le " Moi ", mais l'être qui fait l'expérience de cette permanence. Dans ce domaine, il faut établir des concepts très précis si l’on veut éviter des malentendus. Avec la perception d’un élément durable lors des variations des expériences intérieures se met à poindre le " sentiment du Moi ". Ce n’est pas la sensation d'avoir faim, par exemple, qui peut donner à un être le sentiment du Moi. La faim se fait sentir chaque fois qu'intervient chez cet être la cause en question. S’il se jette sur sa nourriture c'est parce que cette cause agit de nouveau. Le sentiment du Moi n’apparaît qu’à partir du moment où l'être n'est pas seulement poussé vers sa nourriture sous l'action renouvelée des mêmes causes, mais parce qu'ayant précédemment éprouvé du plaisir à satisfaire son appétit, il est resté conscient de ce plaisir, de sorte que ce n'est pas uniquement l'expérience actuelle de la faim mais l'expérience passée du plaisir ressenti qui l'incite à manger. Tout comme le corps physique se décompose quand le corps éthérique ne le maintient plus, tout comme le corps éthérique tombe dans l'inconscient quand l'astral ne l'éclaire plus, l'astral laisserait sombrer sans cesse le passé dans l'oubli si ce passé n'était pas sauvé par le " Moi " et transmis au présent. L'oubli est pour le corps astral ce que la mort est pour le corps physique et le sommeil pour le corps éthérique. On peut aussi dire que la vie est propre au corps éthérique, la conscience au corps astral et le souvenir au Moi.

Il est encore plus facile de faire l'erreur qui consiste à parler de souvenir chez l'animal que d’attribuer la conscience à la plante. On est vite tenté de parler de souvenir quand le chien reconnaît son maître qu’il n'a peut être pas vu depuis un certain temps. En vérité, cette reconnaissance ne repose nullement sur un souvenir mais sur un phénomène entièrement différent. Le chien éprouve à l'égard de son maître une certaine attirance. Celle-ci est due à la nature de ce dernier. Cette nature fait que le chien ressent de la joie lorsque son maître est présent. Et chaque fois que cette présence se renouvelle, la même joie se renouvelle aussi. Le souvenir n'existe vraiment que lorsqu'un être ne se contente pas de vivre seulement ses expériences actuelles, mais qu'il conserve celles du passé. On pourrait même admettre cela tout en restant dans l'erreur de croire que le chien est capable de se souvenir. On pourrait dire, par exemple, que puisqu'il est triste lorsque son maître le quitte, c'est donc qu'il en garde le souvenir. Mais ce jugement est également faux. Par la vie en commun avec son maître, le chien ressent le besoin de sa présence; il souffre par conséquent de son absence comme il souffrirait de la faim. Si l'on ne fait pas des distinctions de ce genre, on ne peut pas accéder à une vision claire des véritables conditions de l'existence.

Par suite de certains préjugés, on objectera à ce qui vient d'être dit qu’on ne peut tout de même pas savoir, s'il y a ou non chez l'animal quelque chose d'analogue au souvenir humain. Une objection de ce genre repose sur un défaut d'observation. Quiconque sait vraiment observer comment l'animal se comporte à l'égard de ses expériences, remarquera combien ce comportement diffère de celui de l'homme. Il se rend compte que l'animal se comporte comme s'il n’existait aucun souvenir. La chose est évidente pour la connaissance suprasensible. Or ce dont l'observation suprasensible prend directement conscience peut aussi être reconnu, d'après ses effets dans ce domaine, au moyen de la perception sensorielle et de la réflexion qui en découle. On prétend que l'homme accède à la connaissance de ses propres souvenirs grâce à une observation de sa propre vie intérieure, et que cette opération ne peut pas se réaliser chez l'animal. Une telle affirmation se fonde sur une fâcheuse erreur. Ce que l'homme peut se dire à propos de sa propre faculté du souvenir, il ne peut nullement le tirer d'une observation de sa vie intérieure, mais uniquement de ce qu'il ressent dans son comportement à l'égard des choses et des phénomènes du monde extérieur. Ces expériences, il les fait avec lui-même, avec autrui et même avec des animaux tout à fait de la même façon. C'est aveuglé par l'apparence qu'il se figure ne juger de l’existence du souvenir que par l'introspection. La force sur laquelle s'appuie le souvenir peut être considérée comme intérieure; le jugement concernant cette force s'acquiert, même pour soi-même, par l'observation du rapport de la vie avec le monde extérieur. Et ce rapport, on peut en juger aussi bien en soi-même que chez un animal. En ces matières, la psychologie usuelle pâtit, par suites d’observations considérablement erronées, de ce que ses conceptions sont très primaires et peu précises.

Pour le " Moi ", le souvenir et l'oubli sont tout à fait analogues à ce que sont la veille et le sommeil pour le corps astral. De même que le sommeil fait disparaître dans le néant les soucis et les inquiétudes de la journée, l'oubli étend un voile sur les expériences fâcheuses de la vie, effaçant ainsi toute une partie du passé. Et de même que le sommeil est nécessaire pour ranimer les forces vitales épuisées, il faut que soient chassées de la mémoire certaines parties du passé, afin qu'on puisse aller, librement et sans prévention, vers de nouvelles expériences. C'est précisément de l'oubli que vient la force de percevoir ce qui est nouveau. Songez par exemple à un fait tel que celui d'apprendre à écrire. L'enfant oublie les multiples détails de cet apprentissage. Ce qui lui reste, c’est la faculté d'écrire. Comment pourrait-on écrire si chaque fois qu'on prenait la plume surgissait dans l'âme le souvenir de toutes les expériences par lesquelles il a fallu passer pour apprendre l'écriture?

Le souvenir comporte différents degrés. Il y a déjà souvenir sous sa forme la plus simple lorsqu'ayant perçu un objet, on peut en faire une représentation après s'en être détourné. On a construit cette représentation pendant qu'on percevait l'objet. Un processus s'est déroulé entre le corps astral et le Moi. Le corps astral a rendu consciente l'impression extérieure de l'objet. Mais la connaissance de l’objet ne durerait que tant qu'il est présent si le Moi ne recueillait pas cette connaissance pour en faire son bien. C'est à ce point précis que la vision suprasensible distingue ce qui est corporel de ce qui est propre à l'âme. On parle du corps astral tant qu’on envisage la formation de la connaissance d’un objet présent. Mais ce qui donne de la durée à cette connaissance, c'est ce que l'on appelle l'âme. On voit aussitôt combien sont étroitement unis chez l'être humain le corps astral et la partie de l'âme qui confère au savoir cette durée. Tous deux forment pour ainsi dire un seul élément au sein de l'entité humaine; c'est pourquoi l'ensemble peut être appelé corps astral. Mais si l'on veut une dénomination précise pour le corps astral humain, il faut parler de corps animique (ou corps psychique), et pour l'âme, dans la mesure où elle est unie à ce corps, d'âme de sensibilité.

Le Moi parvient à un niveau plus élevé de son être lorsqu'il dirige son activité vers la connaissance qu’il a tirée des objets pour se l'assimiler. Telle est l’activité par laquelle le Moi se détache de plus en plus des objets de la perception afin de travailler dans son propre domaine. La partie de l'âme à qui incombe ce travail peut être appelée âme d'entendement ou âme de sentiment. L'âme de sensibilité et l'âme d’entendement ont toutes deux ceci de particulier qu’elles travaillent avec ce qu'elles reçoivent grâce aux impressions venant d’objets perçus par les sens, et qu'elles les conservent dans leur souvenir. L’âme est alors entièrement absorbée dans ce qui, pour elle, est extérieur. Elle a également reçu du dehors ce dont elle fait son propre bien grâce au souvenir. Mais elle peut dépasser tout cela. Elle n'est pas seulement âme de sensibilité et âme d'entendement. La vision suprasensible est le mieux à même de fournir une représentation de ce dépassement en se référant à un fait très simple qui ne peut être apprécié que du point de vue de sa signification très étendue. Il y a dans toute langue un mot, un seul, qui se distingue par son essence de tous les autres; c'est le mot " Moi ". Tout autre nom peut être donné par tout homme aux choses ou aux êtres auxquels il convient. Mais le mot " Moi ", appliqué à un être, n’a de sens que si cet être se l'applique à lui-même. Jamais le mot " Moi " venant de l'extérieur ne peut résonner à l'oreille d’un homme pour le désigner; seul l'être lui-même a le pouvoir de se désigner ainsi. Je suis un " Moi " pour moi seul; pour tout autre je suis un " toi " et tout autre est aussi pour moi-même un " toi ". Ce fait est l'expression d'une profonde et importante vérité. La nature essentielle du " Moi " est indépendante de tout objet extérieur; c'est pourquoi aucun être qui lui est extérieur ne peut l'appeler ainsi. Toutes les confessions religieuses qui ont su maintenir consciemment un lien avec la vision suprasensible disent du mot " Moi " qu’il est le " nom inexprimable de Dieu ". Cette expression se rapporte précisément à ce qui vient d'être dit. Rien d’extérieur n'a accès à la partie de l'âme humaine qui est envisagée ici. C'est là le " sanctuaire caché " de l'âme. Seul peut y pénétrer un être de même nature que cette âme. "Le Dieu qui habite dans l'homme parle quand l'âme se connaît en tant que Moi" Alors que l'âme de sensibilité et l’âme d’entendement vivent dans le monde extérieur, un troisième élément de l'âme plonge dans le monde divin lorsqu'elle parvient à percevoir sa propre essence.

Ceci pourrait facilement prêter à malentendu comme si, en adoptant cette façon de voir, on déclarait que le Moi et Dieu ne font qu'un. Or on ne prétend nullement que le Moi soit Dieu, mais seulement qu'il est de même nature, de même essence que la divinité. Affirme-t-on qu'une goutte d’eau tirée de la mer soit la mer elle-même quand on considère que cette goutte est de même nature, de même substance que la mer? Si l'on veut absolument user d'une comparaison, on peut dire que le " Moi " a le même rapport avec la divinité que la goutte d'eau avec la mer. L’homme peut déceler en lui un élément divin parce que sa nature la plus intime est issue du divin. C'est ainsi que l'homme acquiert par son troisième élément de l'âme une connaissance intérieure de son propre être, de même qu'il acquiert par son corps astral une connaissance du monde extérieur. C'est pourquoi la science spirituelle appelle âme de conscience ce troisième élément de l'âme. L'âme est donc constituée de trois parties: l'âme de sensibilité, l'âme d'entendement et l'âme de conscience, comme le corps humain comprend aussi trois parties: le corps physique, le corps éthérique et le corps astral.

Certaines erreurs d'observation psychologique, analogues à celles dont il a été question à propos de la faculté de se souvenir, font qu’il est également difficile de se faire une idée juste de l'entité du " Moi ". On peut croire que ce qu'on se figure avoir compris est en contradiction avec ce qui est exposé plus haut à ce sujet alors que c'en est une confirmation. C' est le cas par exemple des remarques faites au sujet du " Moi ", par Edouard von Hartmann" dans son livre " Grundriss der Psychologie " (Abrégé de psychologie): " La conscience de soi est antérieure au mot " Moi ". Les pronoms personnels sont apparus assez tard dans l'évolution du langage et n'ont de valeurs qu'en tant qu'abréviations. Le mot" Moi " est un bref succédané pour le nom propre de celui qui parle, mais un succédané dont celui-ci se sert quel que soit le nom que les autres personnes lui donnent. La conscience de soi peut se développer considérablement chez certains animaux et chez des sourds-muets non scolarisés, même sans se rattacher à un nom propre. La conscience du nom propre peut parfaitement remplacer l'absence du mot " Moi ". En adoptant cette façon de voir, on enlève à ce petit mot " Moi " le nimbe magique dont il est entouré pour beaucoup de personnes; il n'ajoute absolument rien au concept de conscience de soi, mais tire même tout son contenu de celui-ci. " On peut se dire entièrement d'accord avec des vues de ce genre et admettre que le mot " Moi " ne doit être entouré d’aucun nimbe magique qui ne ferait que troubler la réflexion sur la question. Mais en ce qui concerne la nature d'une chose, peu importe que l'appellation se soit établie progressivement. Ce qui importe, c'est de savoir que la véritable réalité du Moi au sein de la conscience personnelle est antérieure au mot " Moi " et que l'homme est obligé d'employer ce terme, comme s'appliquant aux propriétés qu’il est seul à posséder, pour désigner ce que, dans son rapport avec le monde extérieur, il ressent autrement que l'animal ne peut le ressentir. Pas plus que le fait d'expliquer comment s'est formé le mot " triangle " ne nous apprend ce qu'est le triangle, ce qu'on peut savoir sur la formation du mot " Moi " dans l'évolution du langage ne nous renseigne sur la nature de ce Moi.

C'est dans l'âme de conscience seulement que se dévoile la véritable nature du " Moi ". Car, par le sentiment et l'entendement, l'âme se perd dans le monde extérieur, tandis qu'en tant qu'âme de conscience elle saisit sa propre essence. C'est pourquoi ce " Moi " ne peut être perçu par l'âme de conscience qu’au moyen d'une certaine activité intérieure. Les représentations d'objets extérieurs se forment d’après la façon dont ces objets surgissent et disparaissent; et ces représentations prolongent leur action dans l'entendement par leur propre force. Mais si le " Moi " doit se percevoir lui-même, il ne suffit pas qu’il subisse les événements; il lui faut d'abord, par une activité intérieure, tirer son essence de ses propres profondeurs pour en avoir ainsi conscience. Avec la perception du " Moi ", avec la conscience de soi, commence une activité intérieure du " Moi ". Du fait de cette activité, la perception du Moi dans l'âme de conscience a, pour l'être humain, une tout autre signification que l’observation de tout ce qui pénètre jusqu'à lui à travers ses trois éléments corporels et les deux autres éléments psychiques. La force par laquelle le Moi se révèle dans l'âme de conscience est la même que celle qui se révèle dans tout le reste de l'univers. Elle n’apparaît pourtant pas directement dans le corps et les éléments inférieurs de l'âme, mais se manifeste graduellement par ses effets. La manifestation la plus basse est celle qui s'exprime par le corps physique, puis elle s'élève par degrés jusqu’à ce qui anime l'âme d’entendement. On pourrait dire qu'à chaque échelon, tombe un des voiles qui enveloppent la réalité cachée. Dans l'âme de conscience, cette réalité cachée apparaît sans voile au plus profond du sanctuaire de l'âme. Elle n'y apparaît qu'à la façon d'une goutte d'eau extraite de cet océan de spiritualité qui pénètre toute chose. C'est là que l'homme doit tout d'abord saisir cette spiritualité. Il doit la reconnaître en lui-même; ensuite il pourra la découvrir aussi dans ses manifestations.

La science spirituelle appelle esprit ce qui, comme une goutte, pénètre dans l’âme de conscience. C'est de la sorte que l'âme de conscience est liée au spirituel qui est ce qu'il y a de caché dans tout ce qui se manifeste. Si l'homme veut saisir l'esprit propre à toute manifestation, il doit procéder de la même manière que pour saisir le Moi dans l'âme de conscience. Il doit étendre à l'univers manifesté l'activité qui lui a permis de percevoir ce Moi. Par là même, il se développe et s'élève à des degrés supérieurs de son être. Il ajoute du nouveau aux éléments corporels et à ceux de l'âme. Son activité suivante consiste à prendre possession de ce qui est caché dans les éléments inférieurs de son âme. Cela se fait au moyen d'un travail de son Moi sur sa propre âme. On voit de quelle façon il s'engage dans ce travail lorsqu'on compare un homme qui s'abandonne entièrement à ses passions les plus basses et à sa sensualité, avec celle d'un être idéaliste. Ce qu’est ce dernier, le premier pourra le devenir s'il renonce à certains bas penchants et se tourne vers de plus nobles; ce faisant, c'est à partir de son Moi qu'il a ennobli, spiritualisé son âme. Le Moi est devenu le maître au sein de sa vie intérieure. Cela peut aller jusqu'au point où aucun désir, aucune jouissance ne pénètre dans l'âme sans que le Moi soit la puissance qui permet cette pénétration. L'âme tout entière devient de la sorte une manifestation du Moi, ce que seule l'âme de conscience était auparavant. Au fond, tout ce qui est vie culturelle et effort spirituel chez l'homme consiste en un travail qui a pour but cette domination du Moi. Et tout être humain actuellement vivant est engagé dans ce travail, qu'il le veuille ou non, qu'il ait ou non conscience de ce fait.

Par ce travail, la voie mène à des degrés supérieurs de l'être humain. L'homme développe ainsi de nouveaux éléments de son entité. Ils demeurent cachés derrière ce qui se manifeste à l'homme. Mais par son travail sur son âme, il peut non seulement assurer à partir de son Moi la maîtrise sur son âme de telle sorte que celle-ci fasse ressortir l'élément caché qui réside dans le monde manifesté, mais il peut aller plus loin encore et étendre son travail. Il peut exercer une action sur le corps astral. Le Moi se saisit ainsi du corps astral en s’unissant à son essence cachée. Dominé par le Moi et transformé par lui, le corps astral devient ce qu'on appelle le Soi-spirituel (Cela correspond à ce que la sagesse orientale appelle " Manas ".) Le Soi-spirituel est un élément supérieur de l'être humain qui existe en lui à l'état de germe et qui par son travail sur lui-même ne cesse de s'épanouir.

L’homme se rend maître de son corps astral en pénétrant jusqu'aux forces cachées; au cours de son développement, il en fait de même pour son corps éthérique, mais le travail sur ce corps éthérique est bien plus considérable que celui qui concerne le corps astral, car ce qui est caché au sein du premier sous deux voiles, l'est dans le corps astral sous un seul. On peut se faire une idée de la différence du travail au sein de ces deux corps en se rendant attentif à certains changements qui peuvent survenir chez l'homme au cours de son développement. Qu’on songe tout d'abord à la façon dont évoluent certaines propriétés psychiques par le travail que le Moi entreprend sur l'âme. Qu'on songe aussi à la façon dont peuvent se transformer le désir, la jouissance et la souffrance. Pour cela il suffit à l'homme de se reporter à sa propre enfance. Quel était alors l'objet de son plaisir, quelle était la cause de sa souffrance ? Qu'a-t-il ajouté à ce qu’il savait étant enfant? Tout cela n'est que l'indice de la domination croissante du Moi sur le corps astral. Car c'est bien lui le siège du plaisir et de la souffrance, de la joie et de la douleur. Par comparaison il faut voir combien peu se transforment, au cours du temps, d'autres particularités humaines, par exemple le tempérament, les traits essentiels du caractère, etc. Chez un homme qui, enfant, était coléreux, certains aspects de sa fougue se maintiendront tout au long de sa vie. Cela est si évident que certains penseurs se refusent à admettre que le caractère fondamental d'un être humain puisse se modifier. Ils estiment que ce caractère persiste à travers toute son existence, mais se manifeste seulement de façons différentes. Ce jugement repose cependant sur un défaut d'observation. Pour celui qui a le sens de ces choses, il est évident que chez l'homme, le caractère et le tempérament se modifient eux aussi sous l'influence de son Moi. Certes, comparée à celles des autres caractéristiques citées plus haut, cette modification est beaucoup plus lente. On peut dire, par comparaison, que ces deux modifications ont entre elles le même rapport que les mouvements de la petite et de la grande aiguille d'une pendule. Or les forces qui opèrent ces changements dans le caractère ou le tempérament font partie du domaine caché du corps éthérique. Elles sont de même nature que les forces qui règnent sur le domaine de la vie, celles de la croissance, de la nutrition et de la reproduction. D'autres éclaircissements seront donnés dans la suite de cet ouvrage. Ce n'est donc pas en se livrant simplement à la joie, à la douleur, au plaisir et à la souffrance que le Moi travaille sur le corps astral, mais en modifiant les particularités de ces qualités d’âme. De même le travail du Moi s'étend au corps éthérique quand il provoque une transformation des traits du caractère, du tempérament, etc. A cette seconde transformation, tout être humain travaille également, qu’il en soit conscient ou non. Les impulsions les plus fortes qui dans la vie ordinaire agissent dans ce sens sont celles de la religion. Si le Moi laisse agir sans cesse sur lui les impulsions qui émanent de la religion, elles finissent par lui donner une force qui agit jusque dans le corps éthérique et le modifie, de même que des impulsions moins puissantes provoquent la transformation du corps astral. Ces dernières qui lui viennent de l'étude, de la réflexion, d'un affinement de la sensibilité, etc. sont tributaires des multiples changements qui interviennent dans l'existence; les impulsions religieuses, par contre, impriment à la pensée, au sentiment et à la volonté un caractère d'unité. Elles répandent en quelque sorte sur toute la vie psychique une clarté commune et unique. L'homme pense et sent aujourd'hui ceci, et demain cela, sous l'effet des causes les plus diverses. Par contre, celui dont les sentiments religieux, quels qu'ils soient, lui font pressentir l'existence de quelque chose qui persiste à travers tous les changements, fera dépendre de ce sentiment de base ce qu'il pense et ressent aujourd'hui, aussi bien que les expériences futures de son âme. La foi religieuse imprègne profondément la vie de l'âme, et les influences de cette foi se renforcent avec le temps par suite de leur répétition continuelle. C'est pourquoi ces impulsions ont le pouvoir d'agir sur le corps éthérique. L'influence de l'art véritable agit de façon analogue sur l'être humain. Lorsqu'au delà de la forme extérieure, de la couleur ou du son, l'homme pénètre par la pensée et le sentiment jusqu'aux fondements spirituels d'une oeuvre d’art, les impulsions que reçoit ainsi le Moi agissent effectivement jusque sur le corps éthérique. Si l'on va jusqu'au bout de cette idée, on peut mesurer l'importance considérable qu'a l'art dans toute l'évolution humaine. Il n’est question ici que de quelques-unes des impulsions qui permettent au Moi d'agir sur le corps éthérique. Il y a encore beaucoup d’influences analogues dans la vie humaine, mais elles ne sont pas aussi évidentes que celles auxquelles nous venons de faire allusion. Celles-ci montrent déjà qu'il y a encore, caché dans la nature humaine, un autre élément que le Moi fait ressortir progressivement. On peut considérer cet élément comme un second aspect de l'esprit et l'appeler Esprit de vie (C'est ce que la sagesse orientale appelle " Bouddhi "). L'appellation d’ " Esprit de vie " se justifie, car dans ce qu'elle désigne ici sont en jeu les mêmes forces qui agissent dans le " corps de vie ". Mais lorsque ces forces se manifestent dans le corps de vie, le Moi humain n'est pas en activité. Lorsqu'elles se révèlent en tant qu’Esprit de vie, elles sont imprégnées de l'activité du Moi.

Le développement intellectuel de l'homme, la purification et l'ennoblissement de ses sentiments et de ses impulsions volontaires indiquent dans quelle mesure son corps astral s'est transformé en Soi-spirituel; ses expériences religieuses et certaines autres expériences s'impriment dans son corps éthérique pour en faire l'Esprit de vie. Dans le cours habituel de l'existence tout cela se passe plus ou moins inconsciemment, alors que ce qu’on appelle l'initiation consiste justement à ce que la connaissance suprasensible indique à l'homme les moyens d’entreprendre de façon tout à fait consciente le travail concernant le Soi-spirituel et l'Esprit de vie. Il sera question de ces moyens dans d'autres parties de cet ouvrage. Pour le moment il s'agissait seulement de montrer que chez l'homme, outre l'âme et le corps, l'esprit est actif lui aussi. Nous verrons par la suite comment cet esprit fait partie de ce qu'il y a déternel en l'homme, en opposition avec le corps qui est éphémère.

Mais son travail sur les corps astral et éthérique n'épuise pas toute l'activité du Moi, car elle s'étend aussi au corps physique. On peut avoir une certaine idée de ce qu’est cette influence du Moi sur le corps physique lorsqu’on voit quelqu’un rougir ou pâlir sous l'effet de diverses émotions. Là en effet, le Moi est la cause d’un processus qui se déroule dans le corps physique. Lorsque des transformations de ce genre se produisent dans le corps physique sous l'influence du Moi, c'est que le Moi est réellement uni aux forces cachées inhérentes à ce corps physique, aux forces qui produisent les phénomènes physiques. On peut dire que, par cette activité, le Moi travaille dans le corps physique. Il ne faut pas se méprendre sur ce qui vient d’être dit. Il ne faudrait pas croire que ce travail soit d'ordre grossièrement matériel. Ce que nous voyons de matériel dans le corps physique n'est que sa manifestation apparente. Derrière cette manifestation se cachent les forces secrètes de son être. Et ces forces sont d’essence spirituelle. Il ne s'agit donc pas d’un travail sur la matière qui donne son apparence au corps physique, mais d'un travail spirituel sur les forces invisibles qui le font naître puis le désagrègent. Dans la vie ordinaire, cette action du Moi sur le corps physique ne peut que très faiblement parvenir à la conscience. Elle n'apparaît en pleine lumière que lorsque, sous l'influence de la connaissance suprasensible, l'homme prend consciemment en main ce travail. Alors il se révèle qu'il y a dans la nature humaine un troisième élément spirituel. C'est celui que, par opposition à l'homme physique, on peut appeler l'Homme-Esprit. (La sagesse orientale lui donne le nom d’" Atma ".)

On est facilement induit en erreur au sujet de l'Homme-Esprit si l'on considère le corps physique comme l'élément le plus bas de l'être humain et donc que l'on a de la peine à se représenter que le travail sur ce corps physique doit en faire l'élément le plus élevé de l'entité humaine. Mais c'est justement parce que le corps physique cache sous un triple voile l'esprit qui agit, qu'il faut la sorte de travail humain la plus haute pour unir le Moi avec l'esprit caché de ce corps.

Ainsi l'être humain se présente, pour la science spirituelle, comme une entité composée de plusieurs éléments. Sa nature corporelle est constituée par le corps physique, le corps éthérique et le corps astral. Sa nature psychique comprend l'âme de sensibilité, l'âme d' entendement et l'âme de conscience. Dans l'âme, le Moi répand sa lumière. Et la nature spirituelle de l'homme est constituée par le Soi-spirituel, l'Esprit de vie et l'Homme-Esprit. Il résulte des explications précédentes que l'âme de sensibilité et le corps astral sont étroitement unis et forment en quelque sorte un tout. L'âme de conscience et le Soi-spirituel forment également un tout. Car c'est dans l'âme de conscience que flamboie l'esprit, et c'est de là qu’il rayonne sur les autres éléments de la nature humaine et les pénètre. En tenant compte de cela, on peut aussi présenter les choses de la façon suivante. On peut considérer que le corps astral et l'âme de sensibilité ne font qu'un et qu'il en est de même de l'âme de conscience et du Soi-spirituel. On peut considérer que l'âme d'entendement est l'égale du " Moi ", parce qu’elle participe à la nature du Moi, parce qu'elle est en quelque sorte déjà le " Moi " qui tout simplement n'a pas encore conscience de sa nature spirituelle. On en arrive ainsi à distinguer chez l'être humain les sept éléments suivants: 1. corps physique, 2. corps éthérique ou corps de vie, 3. corps astral, 4. Moi, 5. Soi-spirituel, 6. Esprit de vie, 7. Homme-Esprit.

Même pour celui qui est habitué aux conceptions matérialistes, cette division de l'homme en sept éléments ne devrait pas avoir ce caractère de mystère nébuleux qu’il lui attribue si souvent, s'il s'en tenait exactement au sens des explications qui précèdent et n'introduisait pas lui-même cette notion de " caractère mystérieux" dans cette affaire. On ne devrait parler ici des sept éléments de la nature humaine d'aucun autre point de vue que de celui d'une forme supérieure de l'observation du monde, exactement comme on le fait des sept couleurs du prisme ou des sept sons de la gamme (l'octave étant considérée comme une répétition de la tonique). De même que la lumière apparaît en sept couleurs et le son en sept degrés, la nature humaine une nous apparaît sous la forme des sept éléments dont il a été question. Appliquer le nombre sept au son et à la couleur n'a rien d'une " superstition ", pas plus que le fait de l'appliquer à la division de la nature humaine. (On a fait remarquer, à l'occasion d’un enseignement donné oralement, que l'histoire des sept couleurs n'est pas toujours exacte puisqu'il existe des couleurs au-delà du rouge et du violet que l’oeil ne perçoit pas. Or cette comparaison avec les couleurs est néanmoins valable, car au-delà du corps physique d’une part et de l’Homme-Esprit d'autre part l'entité humaine se prolonge. Mais ces prolongements sont " spirituellement invisibles " pour l'observation suprasensible, comme le sont, pour l'oeil physique, les couleurs au-delà du rouge et du violet. Cette remarque était nécessaire, car on croit très facilement que la conception suprasensible en prend a son aise avec la pensée scientifique, et on l'accuse alors de dilettantisme. Même si l'on est attentif au sens de ce qui vient d'être dit, on peut se rendre compte qu'il n'y a aucune contradiction avec la véritable science, ni quand, pour rendre les choses plus claires, on fait appel aux résultats de cette science, ni lorsqu'on indique qu'il y a un rapport direct entre les données évoquées et la recherche scientifique.)

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